Pour Messire Guy Michel Billard de Loriere, Conseiller du Roi en son grand conseil ; & Dame Marie Henriette de Saint Simon , son epouse, seigneur et dame de Charenton , Défen-deurs
rerie de Charenton , Demandeurs.
Les sieurs & Dame de Loriere soutiennent que l’on doit plaider en la Cour des Aydes , Tribunal saisi depuis trente ans de toutes les contestations concernant la Terre de Charenton.
Les Freres de la Charité prétendent au contraire que l’on doit plaider aux requêtes du palais sur des droits purement réels , qui font , un bras de Riviere de Marne , & une pièce de Terre de 4. à 5. Arpens sur lesquels ils veulent imposer un droit de servitude ; quoique suivant l’Ordonnance les Requêtes du Palais ne puissent connoître que des affaires personnelles ou mixtes
F A I T
La Terre de Charenton est depuis plusieurs siècles dans la famille de le Bossu , dont la Dame de Loriere est descendüe par la Dame le Bossu Comtesse de Saint Simon , sa mère.
Le Seigneur et les Habitans vivoient en paix avant que les Freres de la Charité fussent établis en cette terre.
Le Seigneur joüissoit paisiblement de la propriété du bras de la Riviere de Marne , qui coule le long de la Seigneurie.
Il donnoit de tems en tems la permission de fermer différentes parties de ce bras aux particuliers qui vouloient y bâtir des Moulins. Il retenoit cens & droit Seigneurials sur ces Moulins nouveaux.
Mais depuis que les frères de la Charité sont venus , rien ne va plus . Arrivés à deux en 1660 en 60 ans ils ont construit un couvent considérable . Ils ont introduit des chevaux de luxe et de carrioles. Le dérangement des affaires du Seigneur occasionna la saisie réelles de la Terre en 1685. Le sieur Abbé le Bossu après la mort de son père en 1694 abandonna les biens de ses père et mère aux créanciers . L‘affaire fut d’abord envoyée devant le Parlement puis à la Cour des Aydes (21 mars 1697). Depuis il y eut plus de 100 arrêts et la saisie réelles y est encore pendantes. Pendant ce temps les frères de la Charité eurent beau jeu de profiter pour obtenir du directeur des créanciers des réductions d’indemnité due au Seigneur . ils allèrent jusqu’à faire courir le bruit qu’ils allaient se faire adjuger la terre de Charenton par les créanciers , l’abbé Le Bossu soucieux de les ménager pour ne pas être dépossédé et les frères en profitèrent pour s’annexer des sentiers et des chemins. Ils mirent même sur la rivière une quantité prodigieuses d’oies. Un soir le sieur de Loriere qui avait épousé en 1710 la nièce du sieur Abbé vint dîner en 1719 chez lui avec sa belle-mère, la comtesse de Saint Simon, un procureur au parlement et un officier. Voici que les oies se mirent dans un vacarme effrayant à ravager les jardins de la seigneurie qui est au bord de la rivière. Le sieur de Loriere prit un fusil et tua 7 ou 8 oies sur la centaine qui faisaient leur vacarme. Aussitôt surgirent les frères de la Charité , leurs valets et leurs chiens firent irruption. Le sieur de Loriere leur dit qu’ils avaient tués leurs oies et qu’ils pouvaient bien les emporter. Ce que les moines firent. Mais le frère Euchère attendait plus loin avec deux valets le cocher du sieur de Lorière qu’ils maltraitèrent . Le cocher alla porter plainte devant le juge de la seigneurie. Les frères de la Charité allèrent chez un commissaire pour le meurtre des oies. Et pour donner plus de poids à leur plainte « ils omirent de nommer le sieur de Loriere, conseiller au grand conseil & propriétaire à cause de la Dame sa femme, du lieu où les oies avaient été tuées ; ils la rendirent contre lui, sous le nom de quidam habillé de gris ». On ne pouvait plus de cruelle offense et c’était aller trop loin. Pris de peur, les frères Placide et Théophile retirèrent leur plainte et promirent de ne plus avoir d’oies. Ce qu’ils exécutèrent. Plus, ils donnèrent au cocher 40 L et les frais de justice. Pour marquer la réconciliation le sieur de lorière alla diner chez les Frères ; Fin du 1er acte mais la pièce qui se joue eut des centaines d’actes puisque en 1745
Il y en eut d’autres dont un assez amusant .
Le 26 may 1721, Monsieur B de L, conseiller au grand conseil, étant dans le carosse de messire Claude de Saint Simon, fut fort surpris en passant dans la rüe de Seine, de voir une trentaine d’Archers environner le carrosse, jetter le cocher et les laquais par terre, ouvrir les portières et vouloir les mener en prison.
En vain, il leur dit sa qualité , leur déclara qu’il n’avoit aucunes mauvaises affaires , & demanda à parler à l’officier qui les commandoit. Le vin et la fureur les rendoit sourds »
Monsieur Billard étant descendu du carrosse près du petit marché fut traîné comme un malheureux , sans perruque, au travers du marché, & conduire à coups de pieds, de poings , & de pommaux d’épées dans la prison de l’Abbaye , pendant qu’on conduisoit le sieur de Saint Simon en carrosse.
Dès qu’ils y furent arrivés, cette troupe furieuse disparut sans écrouer ni l’un ni l’autre.
M. Billard et le sieur de Saint Simon firent venir le commissaire Mesnier et portèrent plainte . Le commissaire fit son référé au Lieutenant Criminel qui ordonna leur élargissement ce qui était bien inutile étant donné qu’ils n’avaient point été écroués 8 l’affaire alla jusque devant le Parlement puis le roi qui fit arreter par lettre de cachet ainsi que plusieurs quidams Cartaignable et Dalencon exempts
MEMOIRE (Janv 1752)
Jabineau de la Voute, avocat
Pour dame Henriette de Saint Simon, épouse de M. de Lorière
Contre M. Billard de Lorière, conseiller au grand conseil
Son mari poursuit l’exécution d’un acte dont elle demande la nullité
FAIT
J’épousai M. de L en 1710, il étoit avocat & j’étois seul héritière du comte de Saint Simon. Sans être fort entétée de ma noblesse , je pourrois dire que celle de mon mari n’a rien perdu de son lustre en entrant dans ma famille :: je ne relève même cette circonstance que parce que mon mari m’a reproché cent fois , qu’il m’avoit fait grâce en me donnant la main.
Notre contrat de mariage fut passé devant un notaire de Chaillot le 28 may 1710 ; il portoit entre autres choses que nous ne serions point commun en biens, & que néanmoins nous pourrions entrer en communauté quand bon nous sembleroit. Le même jour on dressa une contre-lettre qui […] est sous seing privé & qui n’est pas même signée de tous mes parents qui avoient assisté au contrat, ainsi on m’a assuré qu ‘elle etoit nulle
[…]
Mon mariage fut suivi de cinq enfans et d’une foule de Proces[…..]
J’avois apporté en dot des Terres qui valoient plus de 500 milles livres, & j’avois moins de 150 milles livres de dettes.
[…]
En 1745 nous fumes obligés d’abandonner à nos créanciers les revenus des terres de Vaux, Vaus-Gaillard & Charenton ; & il fut convenu que si les créanciers n’étoient point payés au bout de quatre ans , ils pourroient faire vendre nos terres de Vaux et de vaux-Gaillard
[…]
Faute de payement les Créanciers mirent en vente la terre de Vaux & ils l’adjugerent, sauf quinzaine, à 355 mille liv. […] Mais mon mari plus défiant que moi forma opposition à l’adjudication ,[…] il imagina le fameux acte du premier Mai 1751 […]Ø
Par cet acte 1° M. de Loriere et moi nous assurons au Président de Vaux notre fils aîné les terres de Vaux & Vaux-Gaillard & leurs dépendances & nous nous réservons un logement au château , l’usage du colombier, du Parc & des jardins
2° le Président de Vaux s’oblige de payer dans trois ans toutes nos dettes qui se montent à 510 milles livres.
Je n’ennuierai point mes juges par le détails de tous les efforts qu’on fit jouer pour m’engager à signer cet acte ; les prières les plus pressantes , les menaces les plus terribles ; M. de Lorière tantôt à mes genoux, tantôt en fureur ; le ciel, l’enfer, la religion, mon intêret , tout fut mis en usage : enfin après 4 ou 5 heures de persécution je signai pour avoir la paix.
Elle ne dura pas long-tems ; car dès le lendemain on me proposa de signer encore je ne sais quel acte [...]
De mes cinq enfans , l’un est au Séminaire, trois autres sont mariés, il ne me restoit plus que mademoiselle Devaux ma fille. […]. M. de L l’enleva à 4 heures du matin le 24 may 1751, & la conduisit dans un couvent à Pontoise. Ce dernier coup acheva de me déterminer. J’entrai chez les Filles de Sainte Elisabeth près du Temple le 8 juin 1751 : mais M. de Lorière vint m’y chercher dès le même jour.[…]
Comme je n’ai pas envie de faire ici l’histoire de mes malheurs je tire le rideau sur bien des scènes désagréables, ausquelles j’ai été exposée depuis que je suis retournée avec mon mari […]
Elle demande donc d’avoir l’autorisation de prendre toutes les mesures pour parvenir à la liquidation de ses dettes et de celles de son mari, à entrer au couvent d’où son mari l’a fait sortir jusqu’à la liquidation de ses dettes, que la Cour nomme un conseil sans l’avis du quel elle ne pourra contracter aucune obligation, que sa fille se retire dans le même couvent et qu’une provision leur soit versée pour en payer la pension .
BNF FOL-FM-1507
Madame B de L qui représente Nicolas de Saint Simon, aîné, a demandé partage de la successsion de messire de Saint Simon, son ayeul de dame Marie Henriette Leclerc de Lesseville son ayeulle, & de damoiselle Catherine de Saint Simon sa tante commune, contre les sieurs
Sur l’affaire du carrosse de la rue de Seine voici ce que l’on trouve dans les mémoires du marquis d’Argenson du 17 octobre 1755
BNF FOL-FM-1521
Réponse pour M. de Loriere, conseiller au grand conseil à une requete du sieur du Jardin
La sieur du Jardin accuse le sieur de Lorière de l’avoir fait enlever dans les rues de Paris , de lui avoir proposé une obligation solidaire avec son beau-frère, de l’avoir fait conduire dans un carrosse plein de chaînes, de menottes et de cadenas, dans son château de Vaux, de l’avoir privé de communication avec tout le monde, d’avoir employé la force et la violence et les menaces pour lui extorquer un acte obligatoire à un bail. L’affaire vient de ce que un certain Floissac et sa femme Suzanne du Jardin avait affermé la terre de Vaux pour 13 500L par an . Loriere affirma que rien n’avait été payé au premier terme échu, il fit donc un commandement à payer qui n’eut aucune réponse. L’huissier qui fut envoyé revint en disant que le sieur Flassac avait déménagé emportant tout. Quant à son beau-frère sollicité, le fameux du Jardin, il répondit qu’il n’avait rien à voir avec cela . Du coup Lorière ne pouvant faire areter Floissac se rabat sur le beau-frère du Jardin L’histoire ne dit pas comment cela s’est terminé
Scellés après décès de Billard
L e dimanche 31 août 1755 à quatre heurres du matin le commissaire Lemaire est requis pour se rendre cul de sac de la Cour de Rohan car Guy Michel de Lorière vient de décéder dans son appartement du premier étage. Sa femme, Marie Henriette de Saint Simon est là alors que normalement elle habite au couvent de Saint Elizabeth, rue du Temple. Elle s’est fait assister de Nicolas Crémonnier Car elle sait que les choses ne seront pas faciles. Elle en a déjà tellement vu ! Le commissaire doit apposer les scellés. Mais voici qu’apparaît Pierre Billard chevalier seigneur de Vaux, son fils aîné (premier président au bureau des finances chambre du trésor) qui demeurait en la maison.
Il demande que les scellés soient aussi apposés au couvent de Sainte Elizabeth pour y reconnaître les effets et meubles appartenant à la succession de Lorière., ainsi qu’au château de Charenton. Un troisième et un quatrième personnage font leur entrée en scène, il s’agit d’Elizabeth Billard de Vaux et Jerosme Billard de Lorière (pretre du diocèse de Paris et bachelier en théologie de la maison et société de Sorbonne). Ils protestent en ce qui concerne le couvent attendu que la description existe et que le déplacement couterait plus cher que les meubles à estimer. Plus on est de fous , plus on rit. Un cinquième et sixième personnage paraissent. Ce sont Bernard de Massot et son épouse Marie Henriette de Lorière qui eux déclare que les scellés au couvent sont inutiles. La mère intervient disant que ses meubles au couvent lui appartiennent puisqu’elle est séparée de biens avec son mari et qu’elle s’oppsose aux scellés au couvent. Finalement le président de Vaux se désiste de sa demande. On peut donc introduire le commissaire dans la chambre dont la terrasse donne sur la cour de Rohan. Le corps du défunt gt sur sa couchette à bas piliers. Sont là la garde malade, la cuisinière, le portier son mari, les deux laquais. Ils pretent serment qu’ils rien détourné ou dissimulé. Les scellés peuvent commencer. Le commissaire en appose sur une commode de noyer, puis sur un bureau . Le président de Vaux indique que le défunt était dans une grande affliction au moment de son décès à cause de la perte de son procès contre sa femme . Il en fait compliment à sa mère et lui propose de lui donner un logement dans la cour de Rohan consistant en l’antichambre et la chambre du défunt ainsi que deux cabinets qui font suite et une seconde antichambre ainsi qu’une écurie et une remise plus la communauté d’un garde meuble en bas où loge l’infirmière du deffunt, plus la communauté de la chambre où couchent les domestiques de M. de Vaux et ceux du deffunt , plus une cave et un grenier . il déclare que la totalité des meubles de l’antichambre donnant sur l’escalierlui appartiennent ainsi que la glace qui est dans la seconde antichambre entre les deux fenetres ainsi que la cloison qui sépare de la chambre à coucher ainsi que la tapisserie qui est dans la grande chambre qui lui a été donné par le défunt après la mort de sa sœur la contesse de …. En 1749, qu’il en a eu l’usage sans interuption et qu’elle lui a servi dans sa maison de la rue des Petits champs , qu’elle a esté tendue dans l’appartement où nous somme en mars dernier et où est décédée la dame de vaux, et qu’elle se trouve là parce qu’il a consenti à loger son père qui a laissé ses propres meubles au garde meuble de l’appartement qu’il occupait dans la rue du cimetière saint André des Arts. Il décla re que le miroir de la chambre au dessus de la cheminée, les bras de cheminée, les chenets, les rideaux de fenetres , les chassis des croisées lui appartiennent . Que de plus dans le cabinet de la tour , le dessus de cheminéeavec les bras, trois grands tableaux dont l’un représente M. de Vaux, l’autre une panterene et le troisième un géographe sont à lui. La dame de Lorière fait toute réserve sur ces dires, approvée en cela par ses autres enfants.
Le commissaire continue la pose des scellés. D’abord sur un trumeau de cheminée à deux glaces , deux tableaux ovales peints sur bois représentant deux portraits dans leur cadre de bois scilpté et doré , un tableau carré représentant un portrait, trois estampes , un tableau de fleurs dans un cadre doré , une pendule en marqueterie faite par Mazurier, deux bras de cheminée en cuivre , une croix de bois façonné, quatre fauteuils et deux chaises en noyer , un tabouret couverts de tapisserie à l’aiguille, qutre chaises à la capucine, cinq morceaux de tapisserie de verdure
A CONTINUER pour la description
Il n’y a pas moins de 47 oppositions
Le 3 septembre ils se transportent au château de Vaux